"... j'avais toujours pris soin de compenser ma lourdeur de postérieur par ma légèreté d'esprit"

LE JOURNAL DE GROKU, Sophie Laroche, Hachette romans, 2014, 314 pages

Comme son pseudo l'indique Manon a un gros cul. Et c'est la cause de tous ses maux surtout parce qu'une bande de pestes a eu la brillante idée de profiter d'une séance de piscine pour le prendre en photo et publier ledit cliché sur les réseaux sociaux. Manon noie son humiliation dans le chocolat et décide de créer son blog. A partir de ce moment-là, son unique obsession est de maigrir afin d'effacer les kilos en trop en même temps que la honte. Encore un roman jeunesse sur le harcèlement et sur l'anorexie et la boulimie me direz-vous. Oui, pas seulement, c'est bien fait car Groku est quand même drôle, le biais de l'influence des réseaux est un ressort intéressant. Et ce qui est important ici est surtout le manque de confiance en soi et l'écart entre l'image qu'on aimerait donner et la difficulté à s'aimer un peu. Tous ceux qui ont été ou sont toujours des petits gros se reconnaîtront ainsi que ce va et vient entre le dégoût ou la difficulté d'accepter son corps et la pulsion morbide qui pousse à manger pour compenser ce désamour. L'entrée dans la surveillance de l'alimentation et dans le plaisir morbide à s'affamer est décrite sans trémolos et avec un regard presque froid. La vie de Manon s'améliore, elle devient populaire, trouve un petit ami mais elle n'est toujours pas heureuse, la faille narcissique est profonde et la perte de poids ne suffit pas à la combler. L'auteur avoue une perspective pas tout à fait autobiographique mais un peu quand même, et ça sent dans la grande sensibilité dont elle dote son personnage. Un roman qui je pense, plaira davantage à un public féminin au vu des thèmes. Ce volume fait partie de la sélection du défi Babelio.