"La journée venait de se déchirer"

La Porte des Enfers, Laurent Gaudé, Acte Sud, 2008, 267 pages

Pour célébrer la venue de cette nouvelle année que je vous souhaite heureuse et pleine de lectures, de livres et de mots, j'ai décidé de m'offrir la lecture d'un de mes auteurs chouchous, Laurent Gaudé.

A Naples, deux voix nous parlent, deux voix sorties du tombeau ou juste près d'y entrer. Il s'agit de Pippo et de Matteo. Matteo est le père de Pippo, Giuliana est sa mère. Et un matin, un drame se produit sur les trottoirs de Naples, le long du marché. La famille est en souffrance, le couple se déchire. Giuliana sombre peu à peu vers des rivages où elle vivra loin de ses semblables. Matteo lui, cherche dans les rues de la ville une réponse ou un apaisement dans l'oubli. Elle, finira par partir, lui, rencontrera dans un café une étrange compagnie formée d'hommes insolites. Matteo, grâce à eux et à un vieux curé qui sera son guide, ira à la recherche de son enfant de six ans et finira par le ramener au milieu de ses semblables. Je ne peux en dévoiler plus car la beauté du roman tient à l'équilibre entre ces solitudes et ces douleurs.

Dans ce roman que j'ai beaucoup aimé, la beauté côtoie la violence, la souffrance physique et morale sont jumelles. Les hommes et les femmes sont à la fois sublimes et dérisoires. L'Italie en toile de fond donne au texte une dimension tragique, un théâtre à la mesure du drame. Peut-être aussi un lien avec le grand Dante et sa Divine Comédie à laquelle il me semble que Gaudé pense dans son évocation des Enfers. Le vieux curé devenant un guide à la hauteur de Virgile. Vraiment un très beau moment de lecture qui propose de réfléchir sur la mort et sur le lien entre les vivants et les disparus. Une citation qui m'a plu: "...chaque mort, en disparaissant, emmène avec lui un peu des vivants qui l'entourent". Un beau roman à lire.